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Les franchises eSport : un modèle économique durable ou une bulle spéculative ?

L’eSport, autrefois un phénomène de niche réservé aux passionnés de jeux vidéo, est devenu une industrie multimilliardaire attirant investisseurs, sponsors et diffuseurs du monde entier. Aujourd’hui, les franchises eSport suivent un modèle inspiré des ligues sportives nord-américaines comme la NBA ou la NFL, avec des équipes achetant des places permanentes dans des ligues fermées (comme la Call of Duty League ou la Overwatch League).

Mais alors que les investisseurs misent des millions de dollars sur ces franchises, certains analystes s’interrogent : ce modèle est-il réellement viable à long terme, ou assistons-nous à une bulle spéculative vouée à éclater ?

Le modèle économique des franchises eSport : promesse de stabilité et de rentabilité

Un système inspiré des ligues sportives traditionnelles

Contrairement aux compétitions eSport traditionnelles où les équipes doivent se qualifier à chaque saison, les ligues franchisées offrent aux propriétaires une place garantie contre un investissement initial important (entre 10 et 30 millions de dollars selon les ligues).

Les avantages du modèle de franchise :

  • Sécurité financière : Les équipes ne risquent pas la relégation et peuvent planifier à long terme.
  • Attractivité pour les sponsors : Les marques préfèrent investir dans des structures stables.
  • Valorisation des franchises : Comme en NBA ou en NFL, une franchise peut prendre de la valeur et être revendue avec un profit.

Des éditeurs comme Activision Blizzard (Overwatch League, Call of Duty League) et Riot Games (League of Legends) ont adopté ce système pour structurer l’eSport autour d’une économie plus prévisible et professionnelle.

Les sources de revenus des franchises eSport

Pour justifier leurs investissements, les franchises eSport doivent diversifier leurs revenus :

  1. Les droits médias et la diffusion en streaming

    • Les ligues signent des accords exclusifs avec Twitch, YouTube Gaming ou Facebook Gaming pour la diffusion des matchs.
    • Exemple : Activision Blizzard a signé un contrat à 160 millions de dollars avec YouTube pour diffuser la Call of Duty League et l’Overwatch League.
  2. Le sponsoring et le naming

    • Les franchises attirent des grands sponsors comme Red Bull, BMW, Coca-Cola, Mastercard.
    • Certaines équipes signent des contrats de naming, comme Team Vitality et Renault.
  3. Le merchandising et les produits dérivés

    • Vente de maillots, accessoires et goodies aux fans.
    • Collaboration avec des marques de mode (Nike, Adidas, Puma).
  4. Les revenus partagés avec les éditeurs

    • Les ligues franchisées partagent parfois une partie des revenus issus des ventes de skins ou d’objets in-game.

En théorie, ces multiples sources de revenus doivent permettre aux franchises de rentabiliser leur investissement initial. Mais dans la réalité, la situation est plus compliquée…

 

Une rentabilité encore incertaine : signes de surévaluation et modèle fragile

Des investissements colossaux mais des retours financiers limités

Si les franchises eSport se vendent à des dizaines de millions de dollars, les retours sur investissement restent incertains.

  • En 2022, plusieurs rapports ont révélé que la majorité des franchises n’étaient pas rentables et dépendaient encore des financements des investisseurs.
  • Les droits médias, censés être une source majeure de revenus, ne génèrent pas encore les montants attendus, car l’eSport reste un marché difficile à monétiser par rapport aux sports traditionnels.
  • Le sponsoring est fragile, car certaines marques hésitent encore à investir massivement dans un écosystème où l’engagement du public est difficile à convertir en ventes directes.

L’effondrement de l’Overwatch League : un signal inquiétant ?

L’Overwatch League, souvent citée comme un modèle de ligue eSport stable, a connu une chute spectaculaire en 2023 :

  • Les franchises avaient payé jusqu’à 30 millions de dollars pour intégrer la ligue.
  • Les audiences ont chuté, entraînant la perte des contrats de diffusion et le désengagement des sponsors.
  • Résultat : plusieurs équipes ont quitté la ligue, et Activision Blizzard a dû verser des compensations aux franchises restantes.

Cet échec soulève une question fondamentale : le modèle des franchises eSport est-il adapté à la réalité du marché, ou repose-t-il sur une bulle spéculative ?

Une audience massive, mais difficile à monétiser

L’eSport attire des millions de spectateurs, mais ces derniers :

  • Consomment gratuitement (peu d’abonnements payants comme dans le sport traditionnel).
  • Sont très jeunes et moins enclins à dépenser sur des produits premium.
  • Utilisent des bloqueurs de publicité, ce qui réduit les revenus publicitaires.

Contrairement à la NBA ou la Premier League, où les droits TV rapportent des milliards chaque année, l’eSport peine encore à convaincre les diffuseurs de payer des montants équivalents.

 

L’eSport peut-il devenir un modèle économique durable ?

Les ajustements nécessaires pour assurer la viabilité des franchises

Pour que les franchises eSport deviennent rentables et durables, plusieurs ajustements sont nécessaires :

  1. Réduire les coûts d’entrée pour les nouvelles franchises

    • Actuellement, le prix des slots dans certaines ligues est trop élevé par rapport aux revenus générés.
  2. Diversifier les modèles économiques

    • Explorer les abonnements premium pour les fans, comme dans le football.
    • Développer les NFT et skins sponsorisés, déjà testés par certains éditeurs.
  3. Créer un modèle de partage de revenus plus équitable

    • Les éditeurs de jeux (Riot, Activision) contrôlent trop les revenus, laissant peu de marge aux franchises.
    • Une meilleure redistribution des bénéfices issus du jeu (comme les skins en jeu) pourrait aider les équipes à survivre.

L’eSport peut-il suivre la trajectoire du sport traditionnel ?

Le sport traditionnel a mis des décennies à devenir rentable (NBA, NFL, football européen). L’eSport est encore jeune et doit construire une économie durable autour de son audience.

  • Certaines ligues comme la League of Legends Championship Series (LCS) semblent mieux structurées et plus résilientes.
  • L’eSport pourrait adopter un modèle plus hybride, combinant franchises stables et tournois ouverts.
  • L’innovation technologique (réalité virtuelle, métavers, blockchain) pourrait créer de nouvelles sources de revenus encore inexploitées.

 

Un marché prometteur, mais encore fragile

Le modèle des franchises eSport est séduisant sur le papier, mais il repose encore sur des bases économiques fragiles.

  • Certaines ligues (Overwatch League) ont montré les limites du modèle actuel, tandis que d’autres (League of Legends) semblent mieux gérées.
  • Les investisseurs doivent être prudents, car l’eSport est encore un marché en évolution, où la rentabilité n’est pas garantie à court terme.
  • Si l’eSport parvient à mieux monétiser son audience et à structurer son modèle économique, il pourrait s’imposer comme un véritable pilier du divertissement mondial.

Reste à savoir si ce secteur pourra éviter l’éclatement d’une bulle spéculative ou s’il trouvera enfin un modèle économique solide et durable.